Jusqu’au 3 février prochain, « Figures du Fou : Du Moyen Âge aux Romantiques » offre une plongée dans l’imaginaire médiéval et au-delà, à la rencontre de cette figure complexe, subversive et profondément humaine qu’est le fou.
À une époque où l’art médiéval est souvent réduit à sa dimension religieuse, cette exposition démontre avec éclat combien la folie a façonné les imaginaires, transgressant les frontières entre sacré et profane. Le fou médiéval, avec ses marottes, son habit mi-parti et ses grelots, est bien plus qu’un simple bouffon : il est tour à tour critique social, miroir des travers humains et provocateur. Il incarne la tension entre sagesse divine et démesure humaine.
Le parcours, riche de plus de 300 œuvres, s’apparente à une mosaïque où chaque pièce raconte une facette de la folie : des enluminures des manuscrits chevaleresques aux tapisseries foisonnantes, en passant par les sculptures et les gravures d’une finesse inégalée. À travers les méandres du Moyen Âge et de la Renaissance, le visiteur découvre comment le fou devient un acteur clé des fêtes carnavalesques, un critique de la société et même un témoin des déchirements religieux de la Réforme.
Les commissaires, Élisabeth Antoine-König et Pierre-Yves Le Pogam, ont su donner une cohérence à cette figure protéiforme. Leur regard éclairé met en évidence comment le fou évolue : du mysticisme du XIIIe siècle aux caricatures sociales du XVe siècle, pour finir par les réinterprétations romantiques où la folie devient tragique, presque mythologique. L’art de Bosch et de Bruegel illustre magnifiquement ce tournant, où le fou n’est plus seulement un amuseur mais le reflet de la condition humaine, avec ses absurdités et ses angoisses.
Cette exposition ne se limite pas à une contemplation passive. Elle interroge : qu’est-ce que la folie ? Qui définit les limites entre la raison et le déraisonnable ? En ces temps troublés, où les clivages sociaux et politiques restent vifs, la figure du fou trouve une résonance particulière. Peut-être parce qu’il demeure celui qui, au-delà des époques, ose dire l’indicible, révéler l’inconfortable.
Une visite s’impose donc, non seulement pour admirer la richesse des œuvres exposées mais aussi pour se laisser questionner, émouvoir et troubler. Car en chaque fou, il y a un peu de nous-mêmes, entre la sagesse et la folie, entre l’ordre et le chaos.
Infos pratiques
Musée du Louvre, rue de Rivoli, 75001 Paris
Jusqu’au 3 février 2025, Hall Napoléon
Horaires : Le musée est ouvert de 9h à 18h les lundis, jeudis, samedis et dimanches, et de 9h à 21h les mercredis et vendredis. Fermeture le mardi. Dernière admission : 1 h avant la fermeture/Évacuation des salles : 30 min avant la fermeture. Les billets peuvent être réservés en ligne sur le site du Louvre ou achetés directement sur place.