« Renaissance Traditionnelle », le numéro 208 de la revue d'études maçonniques et symboliques

Dans son numéro 208, Renaissance Traditionnelle offre une exploration dense et captivante des thèmes maçonniques et symboliques, articulée autour d’études érudites et d’inédits d’une richesse inestimable. Ce panorama, dirigé par Roger Dachez, se distingue par quatre contributions remarquables qui méritent une attention toute particulière.

Dominique Clairembault, rédacteur en chef des Nouveaux Cahiers de Saint-Martin, dans son évocation du « 400ᵉ anniversaire de la mort de Jacob Boehme (1575-1624) », nous plonge dans les derniers instants de la vie de ce théosophe allemand. Jacob Boehme, considéré comme le « deuxième maître » de Saint-Martin, a laissé une empreinte indélébile dans l’univers mystique. L’article propose la traduction inédite d’écrits introduisant une édition française de 1826 de Clef ou explication des divers points et termes principaux. Les récits touchants des épreuves de Boehme, jusqu’à l’intervention controversée d’un pasteur, révèlent les tensions entre orthodoxie religieuse et élans spirituels non conformistes. Cet hommage résonne comme une exploration de la transmission, de l’élan réformatif porté par ses disciples jusqu’à une spiritualité intérieure et universelle.

Dans une seconde contribution, toujours sous la plume de Dominique Clairembault, nous découvrons les « Pensées inédites de Jean-Baptiste Willermoz… » Ces aphorismes et fragments posthumes éclairent l’univers intime du fondateur du Rite Écossais Rectifié, témoignant d’un christianisme où la raison et la foi s’entrelacent. Révélateurs d’un dialogue spirituel entre Willermoz et Saint-Martin, ces textes nous plongent au cœur des aspirations illuministes : purifier l’âme par une pratique rigoureuse et accessible de la vertu. L’érudition de Clairembault réactive ainsi des filiations spirituelles complexes, rappelant que le silence des archives peut parfois hurler des vérités intemporelles.

John Belton s’attaque, dans « La Grande Loge Unie d’Angleterre, Dieu et l’immortalité de l’âme », à l’un des débats maçonniques majeurs de la fin du XIXᵉ siècle. En examinant les conséquences des modifications des Constitutions du Grand Orient de France, cet article détaille comment ces bouleversements doctrinaux – le retrait de l’obligation de croire en Dieu et en l’immortalité de l’âme – ont cristallisé une rupture durable entre les traditions maçonniques française et anglaise. L’analyse de John Belton est d’autant plus précieuse qu’elle articule un examen critique des réactions britanniques tout en soulignant les malentendus et tensions d’une période de transformation rapide des valeurs maçonniques. Enfin, Jean-Michel Mathonière, avec « Notes à propos de la géométrie fondamentale des bâtisseurs », déploie une analyse incisive de la transmission supposée des savoirs opératifs aux loges spéculatives. Il questionne les mythologies entourant la « science secrète des bâtisseurs » en déconstruisant les interprétations approximatives ou complaisantes qui continuent de circuler. Ses propos, empreints de rigueur historique, invitent les maçons à distinguer fantasmagories et vérités historiques. En démontrant combien l’art de la géométrie peut être élevé au rang de symbolisme initiatique, Mathonière inscrit son propos dans une tradition où l’érudition se fait passeuse d’éveil.

Ces contributions, et comment ne pas citer celles de Jozef Van Bellingen sur « Le Magikon de Johann Friedrich Kleuker », de Bernard Homery sur « Robert Sambert (1682-1745) », celle de Roger Dachez sur « Haugwitz, Christian, Karl, Heinrich (August, Heinrich, Curt) (1752-1832) » et « Waechter (Wächter) Carl Eberhard, baron von, 1747-1825 », de Boris Nicaise sur « Le diplôme maçonnique d’un français dans l’armée belge », Jean-Michel Mathonière sur « Notes autour d’une médaille compagnonnique » et bien évidemment la chronique « Comptes rendus de livres », en éclairant des pans méconnus ou oubliés de la tradition, permettent aux lecteurs d’arpenter des territoires à la fois familiers et nouveaux. Que ce soit par la redécouverte des pères spirituels de la maçonnerie, l’analyse critique des fondements symboliques ou l’étude des débats doctrinaux, ce numéro incarne une quête incessante de vérité initiatique. Chaque page, tissée d’érudition et de passion, réaffirme le rôle essentiel de Renaissance Traditionnelle comme gardienne et passeuse des trésors symboliques et maçonniques. Renaissance Traditionnelle  Revue d’études maçonniques et symboliques Renaissance Traditionnelle, N°208, juillet-décembre 2024, 128 pages, 17 €